Le décommissionnement de systèmes d'information, un enjeu stratégique mal compris
Le décommissionnement de systèmes d'information est souvent vu uniquement sous un prisme technique, afin de gagner du temps serveur, économiser des VM, la DSI fait la chasse aux applis qui tournent et qui ne devraient plus. Or on néglige trop souvent la dimension métier de ce décommissionnement.
En effet, les applications qui sont décommissionnées sont des applications largement obsolètes mais qu’en est-il de cette zone grise des applications anciennes, parfois obsolètes techniquement, mais qui restent accessibles car elles remplissent une fonction qui n’a été reprise dans aucun autre outil ou que certains utilisateurs y sont attachés et que la conduite du changement n’a pas réussi à les amener sur les nouveaux outils. Cet enchevêtrement de petits outils qui sont alimentés manuellement et produisent ici un reporting spécifique pour une entité, là un rapport justificatif dont on a besoin pour la liasse comptable et qui a été négligé lors de la construction de l’ERP flambant neuf.
Dans une trajectoire SI, on se concentre sur le build, c’est bien normal, et on se dit que le nouvel outil est tellement plus pratique que les utilisateurs migreront naturellement vers les nouvelles pratiques.
Or c’est rarement le cas, pour les raisons évoquées plus haut :
- Difficultés à reprendre d’un coup l’ensemble des fonctionnalités portées par tous les outils existants
- Resistance naturelle au changement qui va occasionner des résistances et des replis sur les outils existants
Néanmoins, il est coûteux de conserver ces applications du legacy, à la fois en termes d’infrastructure mais aussi en performance pour les équipes, et un vrai plan de décommissionnement fonctionnel est une phase nécessaire pour accompagner tout grand projet de mise en œuvre d’un nouvel outil.
De mars à juillet 2020, nous sommes intervenus au sein de la Direction Financière d’une grande entreprise du secteur des transports. Notre étude s’est inscrite dans deux démarches ambitieuses et complémentaires :
- La mise en place d’un programme d’outils de pilotage de la performance économique, ayant pour objectif de faire évoluer les processus et outils de suivi de la performance économique
- Une entité de Gouvernance de la donnée avec pour mission la définition du nouveau MDG, la modélisation des données financières ainsi que la mise en place de la gouvernance de ces données
Notre mission :
L’objectif de notre mission était de réaliser une étude sur les possibilités de décommissionnements d’outils décisionnels sur un périmètre applicatif assez large. Ces éventuels décommissionnements interviennent dans un environnement applicatif complexe et hétérogène. Notre mission doit permettre de garantir la cohérence globale des reportings de gestion, en unifiant les processus vers le nouvel outil et en simplifiant le paysage applicatif et les processus associés.
Concrètement, nous avons été amenés à :
- Définir notre périmètre d’action
- Rencontrer les interlocuteurs opérationnels (contrôle de gestion, production) : identifier tous les outils décisionnels officiels ou non (shadow IT) qu’ils utilisent dans leur processus de gestion, ainsi que les types d’utilisation (restitutions directes ou extractions pour des bases excel/power BI)
- Rencontrer les interlocuteurs DSI : identifier les sources, les adhérences entre les différentes applications et les coûts de maintenance associés
- Participer aux ateliers avec le groupe projet du nouvel outil de pilotage de la performance : déterminer les zones de partage fonctionnels entre le nouvel outil et les applications qui pourraient faire l’objet d’un décommissionnement, mais également les évolutions nécessaires à apporter en vue d’un décommissionnement et les efforts de conduite du changement pour l’adoption du nouvel outil
- Réaliser une cartographie des applications : démontrer la multiplicité et la complexité du paysage applicatif et identifier les simplifications possibles
- Construire une grille d’analyse : définir et ordonner l’ensemble des critères permettant de rendre le décommissionnement des applications plus ou moins prioritaires
- Réaliser le livrable final pour la restitution : expliquer la démarche de l’étude, analyser les différents retours des ateliers métiers et DSI, et pour les outils dont le décommissionnement nous est apparu comme prioritaire, présenter les différentes hypothèses (décommissionnement ou non) avec les impacts associés (notamment impacts financiers)
Les enjeux de la mission :
Les principaux enjeux de cette mission ont été les suivants :
- Mettre en lumière la complexité du paysage applicatif actuel
- Souligner l’importance du projet de gouvernance de la donnée
- Démontrer la nécessité d’optimiser et de simplifier les outils de gestion à l’aide d’une application de reporting moderne et facilement adaptable
Les conclusions de notre étude ont permis d’orienter les décisions stratégiques dans les différents comités de pilotage.
Choisir un outil d'assistance aux clôtures, un REX
Par Alain Wetie, Chef de Projet Génération Conseil
Il y a quelques semaines, j’étais en réunion avec la responsable comptable de la société ferroviaire auprès de laquelle je suis en mission. A la fin de la réunion, elle me dit de but en blanc : « j’ai été invitée à un petit dej’ RPA et je veux tel outil ».
La RPA est un sujet à la mode et nos clients ont été très sollicités par des commerciaux très efficaces qui leur ont vanté la qualité de leurs outils. Or, le choix d’un outil est un processus qui comporte un certain nombre de pièges. En tant que consultant AMOA qui fait l’interface entre la DSI et le business, je sais que ces pièges peuvent être déjoués par une démarche rigoureuse dans la compréhension des besoins. Nous avons donc pris rendez-vous avec elle pour lui expliquer cette démarche, que nous avons voulu la plus pragmatique possible et sans vocabulaire globish facile en -ing.
En effet, cette société dispose déjà de bons nombres d’outils comptables, lui permettant de gérer le process jusqu’à remonter un état consolidé des comptes au niveau Groupe.
Le processus de clôture de comptes fait l’objet cependant d’une réflexion générale dans le but de le rationaliser et de l’optimiser. Ainsi nous avons été sollicités pour mettre en œuvre un outil de justification des comptes.
Or la méthode de choix comporte en elle-même les conditions nécessaires (mais pas suffisantes) du succès. Elle doit être menée avec rigueur sous peine de céder à des sirènes commerciales et de se retrouver avec un outil mal adapté, trop cher, trop lourd ou nécessitant trop de spécifiques. C’est cette démarche que nous allons présenter.
Faire émerger un projet, c’est commencer par en identifier les acteurs
Aujourd’hui la société parvient à produire des comptes consolidés dans les temps, avec un niveau de qualité accepté par les commissaires aux comptes. Cependant il est compliqué pour les responsables de répondre aux questions précises des commissaires aux comptes ou de la hiérarchie sur la situation d’un compte. En effet lorsque ce type de question se présente, les responsables financiers ont du mal à trouver le bon interlocuteur pour leur donner les éléments de réponses dont ils ont besoins.
Ces interlocuteurs sont de plusieurs ordres :
- Le comptable en charge du compte : sauf que cette responsabilité n’est pas clairement définie pour l’ensemble des comptes
- Le Pôle Synthèse Comptable qui centralise un certain nombre de justificatifs de comptes, mais ce process n’est pas systématique et beaucoup de justifications de comptes ne sont pas transmises à ce pôle
- Le Centre de Services Partagés Comptable, qui en général produit des justificatifs de comptes pour ses besoins propres et ne les transmettent qu’à la demande
De ces constats émerge le besoin de centraliser les informations sur les comptes pour qu’ils soient accessibles au bon moment par les personnes habilitées.
Au-delà de la centralisation des justifications de comptes, un processus clair doit être mis œuvre avec des responsabilités fonctionnelles distinctes et un périmètre de comptes bien défini pour chaque responsable et sur l’exhaustivité des comptes.
Nous avons donc reçu le mandat de trouver un outil du marché nous permettant de maîtriser ce process de justification de comptes.
Tout le monde est d’accord sur la méthode, alors maintenant on déroule
Mettre en œuvre une démarche de choix, c’est réaliser un travail à quatre mains permettant d’instaurer une relation de confiance entre la DSI et le métier.
La première étape pour nous a consisté en la rédaction d’une expression de besoin. Celle-ci a été rédigée de concert avec le métier.
En effet, le premier piège à éviter, c’est de partir des outils pour définir le besoin, pour « faciliter la tâche » au métier.
Lors d’une réunion de lancement avec l’ensemble des responsables de la comptabilité, nous avons :
- Validé le processus de justification de comptes
- Validé les règles de gestion et exigences communes à tous les cycles comptables
- Défini les périmètres de responsabilités
Partir du process métier avant toute mention de l’outil
L’outil devra être structuré autour d’un process de validation de comptes, qui déploiera un workflow adressé à des acteurs aux actions spécifiques dans l’outil.
Les acteurs :
- Le contributeur : c’est un comptable qui impute le compte concerné et donc est en charge de justifier son solde en fin de période
- Le valideur : c’est un responsable de département comptable, qui approuve la justification de compte fait par un contributeur
- Le réviseur : c’est un responsable du Pôle Synthèse Comptable qui a un rôle de monitoring, il centralise les justificatifs de compte et vérifie l’exhaustivité des justificatifs et le cas échéant fait des relances aux contributeurs ou aux valideurs
Le process :
Avoir en visu les règles de gestion et les exigences
Le métier a défini quelques exigences et règles de gestion qui présideront au choix de l’outil :
- Seuls les comptes de bilans feront l’objet de justification dans l’outil à mettre en place
- Les méthodes de justification de comptes ne seront pas remises en question par l’implémentation de l’outil
- Tous les comptes présentant un solde non nul ainsi que les comptes ayant un solde à 0 mais qui ont été mouvementés pendant l’exercice comptable, devront être affectés à un responsable
- Un responsable référent devra être désigné pour les « comptes partagés »
- Des droits d’accès seront paramétrés suivant le périmètre de chaque responsable
- La solution devra contenir des règles de rapprochement configurables pour le lettrage automatique des postes
- La certification devra être automatique pour certains comptes, dont le solde est nul en fin de période
A ce stade du projet il est important de laisser le métier construire son besoin indépendamment des possibilités offertes par les outils sur le marché. L’expression du besoin doit précéder les choix des outils.
Définir les responsabilités pour une gouvernance optimale
Les périmètres de responsabilités s’articuleront autour des différents cycles comptables :
- Capitaux propres
- Immobilisations
- Clients
- Fournisseurs
- Personnel
- Impôts et taxes
- Stocks
- Trésorerie
L’organisation matricielle de la société nous impose cependant une définition beaucoup plus fine du périmètre.
En ajoutant les dimensions organisationnelles fines et les SI amonts comme facteur de délimitation des responsabilités, on obtient le triptyque (Compte général / Division / SI amont). La combinaison de ces trois paramètres, permet d’obtenir un responsable unique sur le périmètre de responsabilité.
Tout le monde sait ce qu’il a à faire, nous pouvons chercher à optimiser…
A la suite de la définition des périmètres de responsabilité, des ateliers sont organisés avec les responsables des différents cycles comptables, qui s’engagent sur une liste de comptes dont leur incombe la justification. A l’issue d’une première série d’ateliers, trois types de comptes sont identifiés :
- Les comptes affectés : comptes sur lesquels un responsable s’est engagé
- Les comptes partagés : comptes sur lesquels plusieurs responsables se sont engagés
- Les comptes orphelins : comptes sur lesquels aucun responsable ne s’est engagé
Cet engagement formel des responsables sur leur périmètre de compte est important pour la suite du projet. Il permet de mesurer l’engagement du métier et favorise son implication dans le projet. Des éléments déterminants dans l’acceptation de l’outil qui sera mis en place.
Cependant l’affectation des comptes orphelins doit faire l’objet d’une décision du management quant à leurs affections. Car tous les comptes doivent impérativement être affectés dans l’outil.
Dans ces ateliers les responsables de cycles, décrivent la méthode de justification de comptes, les différentes tâches menées, les formats de fichiers utilisés, les Si amonts concernés. Ils font des propositions sur les possibilités d’optimisation ou d’automatisation de certaines tâches.
Et c’est seulement là qu’on peut parler des outils…
Un besoin clair et délimité mais une solution évolutive
En parallèle des ateliers avec le métier, nous avons pris contact avec des éditeurs de solutions comptables en générale de façon plus ou moins formelle, pour avoir une idée des solutions proposées sur le marché.
Éditeurs Contactés et Solutions
EDITEUR |
SOLUTION |
DESCRIPTION |
TRINTECH | CADENCY | Solution d'automatisation comptable et financière à englober toutes les activités de Record to Report en un seul processus unifié |
CALIXYS | XREC | Solution qui permet d’effectuer des contrôles, des lettrages et des rapprochements instantanés sur les données et les comptes de l’entreprise. |
ACA | ISIE | Solution de traduction de données inter-applicative dont l’application principale est l’interprétation et la traduction comptable et financière. Son champ d’action permet de répondre à tout type d’échanges inter-applicatifs tant sur les données applicatives de gestion que sur les éléments de référentiels |
BLACKLINE | BLACKLINE | Solution qui aide les entreprises à moderniser leurs processus et à y intégrer du contrôle tout en leur offrant une visibilité sans précédent sur leurs processus comptables et financiers grâce à la centralisation des différentes fonctions clés sur une seule et même plateforme |
INFOR | BIRST | Solution qui aide les entreprises à comprendre et à optimiser des processus complexes plus vite qu'avec des solutions traditionnelles |
Les ateliers avec le métier et les entretiens de pré-consultation avec les éditeurs nous ont permis d’affiner notre expression de besoin pour produire des livrables :
- Un cahier de charge : qui décrit les contextes du projet, expose les exigences fonctionnelles et les exigences techniques sur la base desquelles les éditeurs devront faire des propositions de solution
- Une matrice des exigences : une grille d’évaluation des différentes solutions proposées par les éditeurs. Cette grille liste le détail des exigences, et attribue à chacune d’elle une pondération suivant les degrés d’importance pour le métier
Et si nous parlions des autres besoins. Un peu de prospective avec nos métiers
Au fil des entretiens avec le métier d’autres besoins liés à l’objectif global d’optimisation du processus de clôture comptable ont émergé, tels que :
- La planification des tâches de clôture
- L’automatisation de la réconciliation intercos
- Centralisation des écritures manuelles
- Automatisation du lettrage des comptes non soldés
Dans le cadre de la consultation, il est prévu de privilégier des outils sur lesquels nous pourrons intégrer d’autres solutions liées à ces besoins connexes.
To be continued…